Après une courte escale à Patan, le 20 mai nous ré-enfourchons nos vélos, direction le sud et le Parc National du Chitwan. Sur les indications de nos hôtes, nous prenons un itinéraire peu fréquenté qui passe par Pharping et Kulé Kani, puis Hétauda. La route serpente à flanc de montagne, descend sur un grand lac de barrage, puis remonte, très raide, pour enfin plonger dans le Téraï. L'homme est omniprésent. Népal : pays vertical, et pourtant la moindre parcelle est cultivée, le moindre replat habité. Pas moyen de trouver un petit coin tranquille pour une pause pipi. Les népalais ont investi le flanc des montagnes pour y cultiver en terrasses du blé, du riz, des choux, etc … Pratique quand on arrive à un carrefour et qu'on hésite sur la route ou la piste à prendre : il y a toujours quelqu'un pour nous renseigner.
Nous arrivons à Pharping trempés jusqu'aux os, et décidons d'y faire escale pour sécher un peu. Nous en profitons pour visiter l'un des nombreux monastères tibétains implantés dans la région. Les moines et nonnes se promènent dans les rues du bourg dans leurs tenues couleur prune et safran. Nous passons devant la grotte où Rinpoche a médité (celui qui a amené le Bouddhisme au Népal). Il y a ce jour-là une grande fête en son honneur, et du coup, des moines nous donnent de petits cadeaux de bienvenue : des biscuits et des bonbons !
La journée de vélo de Pharping à Hétauda est bien remplie ; nous atteignons notre but à la tombée de la nuit. Alors que nous roulons, frontales sur la tête et yeux bien écarquillés, nous entendons à l'arrière de notre convoi, un tonitruant : « Ahhhh ! Purée ! C'est pas vrai ! ».... Jean-François venait de se prendre une chauve-souris en pleine figure ! Elle devait avoir le sonar défaillant. Tout de suite, Clémentine inquiète demande : « est-ce qu'elle est morte ? », puis vite rassurée : « est-ce qu'elle était douce ? ». C'était l'anecdote du jour. C'est bien, ça pimente nos journées !
Le lendemain, nous empruntons la route principale pour aller à Sauraha. C'est tout plat, tout droit et bordé de rizières. Il y a pas mal de camions et de bus, quelques gros 4x4 aussi. Ca demande pas mal d'attention, parce qu'il faut aussi éviter les piétons, les chèvres et les trous, mais contrairement à ce que vous pourriez croire, ce n'est pas si dangereux que ça en a l'air ! A part 2 ou 3 fois où nous avons préféré nous mettre sur le bas côté parce qu'un véhicule doublait en face, la circulation n'est pas aussi intense et rapide que dans nos pays « civilisés ». Et franchement, nous avons eu plus peur au Québec et en Nouvelle-Zélande. Quand un petit camion double à 50km/h, le seul inconfort ce sont les gaz d'échappement …. Il faut pédaler en apnée pendant quelques secondes … Et puis, il faut dire aussi qu'il y a du spectacle tout le temps ! Des chèvres debout en équilibre sur le toit d'un bus, des militaires qui font un footing en suant à grosses gouttes, des gens qui s'épouillent, des fers à bétons qui dépassent de 5 m derrière un camion, un énorme serpent de 2 m écrasé au milieu de la route, des écoliers en uniforme qui rentrent de l'école, un marchand de glaces ambulant qui déplace sa marchandise dans une caisse en polystyrène par 35°C à l'ombre, … et à l'approche des villes : des détritus de toutes sortes, partout et sur plusieurs épaisseurs. Le « pittoresque » n'a pas que des bons côtés. Le Népal souffre cruellement d'un manque d'infrastructures : les routes en mauvais état ou pas goudronnées, peu de tout à l'égout, pas d'eau potable au robinet, et très souvent pas d'eau du tout. Il y a des coupures d'électricité de plusieurs heures par jour, partout et tous les jours, donc pas de moyen de conserver correctement les aliments. Pas de gestion des déchets non plus : ce sont les rivières qui servent souvent de décharges. Il faut dire que le pays est sorti d'une guerre civile il y a seulement 5 ans, et que le gouvernement actuel n'est pas encore très organisé … la corruption a peut-être diminué, mais elle empoisonne toujours la vie publique et les administrations. A tout cela, s'ajoute une géographie pas favorable du tout. Népal : pays vertical et pays à la merci de la saison des pluie.
Revenons à notre excursion dans le Téraï. Sauraha est la base principale des excursions dans le Parc National du Chitwan. Ce parc abrite des tigres, plus de 500 rhinocéros, quelques rares éléphants sauvages, des singes, de nombreux daims et pléthore d'oiseaux multicolores. Sauraha est aussi, ou par conséquent, un spot touristique bien développé. Il paraît qu'il y aurait une centaine d'hôtels et Guest House ! Il paraît aussi qu'en pleine saison touristique (septembre à décembre), c'est plein à craquer ! Pas moyen de trouver une chambre, plus de place pour les excursions, ni pour les balades à dos d'éléphant. Ça nous paraît d'autant plus incroyable que nous débarquons là à la basse saison. Nous sommes seuls dans l'hôtel, les rues sont tranquilles, à part le passage de temps à autres d'un pachyderme débonnaire, et les resto déserts.
Sauraha : temps fort de notre séjour au Népal et rencontre avec les éléphants. Voici ce que vous en disent les filles :
Impressions d'Anaëlle :
J'ai beaucoup aimé le Teraï. La seule chose, c'est qu'il faisait chaud … Nous avons fait une balade à dos d'éléphant, et nous avons vu 3 rhinocéros, des daims, des cerfs et même des crocodiles. Il faisait humide, alors on transpirait beaucoup. Nous avons aussi fait un tour en jeep, et ça nous a fait beaucoup d'air. Tous les matins, nous nous sommes baignés avec les éléphants. Ça nous rafraîchissait beaucoup, mais comme l'eau n'était pas très propre, en rentrant, une autre douche nous attendait. J'ai adoré ces moments car en plus, notre cornac (dresseur de l'éléphant) était très gentil et notre éléphant aussi. Pour moi, la chaleur était agréable, sauf le midi. Heureusement qu'on avait la clim. dans la chambre ! J'avais envie de rester dans le Teraï toute ma vie ! Mais on était obligé de partir.
Impressions de Clémentine :
Dans le Teraï, il fait chaud et humide, et il y a des moustiques, comme dans tous les endroits comme ça. Nous avons fait un tour en jeep où nous avons vu : un gros rhinocéros mâle, un gros buffle, plein de petits daims, 2 grands daims, un singe à crinière blanche, un aigle, une grande famille de paon et des oiseaux. Nous avons aussi vu des crocodiles dans la rivière. Le tour en jeep était bien, sauf que c'était un peu bruyant ; ça éloignait les animaux. Mais c'était quand même super, car on allait plus loin dans la forêt.
Ensuite, nous avons fait un tour à dos d'éléphant. Les animaux n'étaient pas effrayés par la présence de l'éléphant. Nous avons vu 3 rhinocéros et des daims, dont 2 mâles.
Tous les matins, de 10h à midi, il y avait le bain des éléphants. Nous pouvions aller nous baigner avec eux : c'était génial ! Nous montions à cru sur le dos de l'éléphant, puis au signal du cornac, il nous arrosait avec sa trompe ... Ou alors, il nous faisait tomber dans l'eau et il nous faisait remonter et nous soulevant avec sa trompe ! On y allait tous les jours. J'aurais bien aimé rester dans le Teraï quelques jours de plus, mais il faisait vraiment trop chaud. Je le répète : c'était super !
Ps : Maman aurait entendu un rhinocéros traverser le jardin de l'hôtel la nuit …
Un après-midi, nous visitons la nurserie des éléphants, où grandissent les futurs compagnons de l'armée népalaise ... L'un deux n'a que quelques jours et fait le pitre. Encore très instable sur ses grosses pattes, il vient nous voir puis repart en courant.
Oui, c'est vrai : nous avons tous adoré les douches avec les éléphants …. D'abord, il faut monter dessus, et même si l'éléphant se couche, ça reste haut à escalader. Ensuite, on s'assied à califourchon sur la peau rugueuse et poilue : Jean-François adore, il trouve ça magique de toucher cette peau ! Puis, l'éléphant entre dans l'eau et là, on attend, avec tout de même un légère appréhension … Au signal du cornac, l'éléphant lève la trompe et nous balance une bonne giclée d'eau fraîche. Parfois, l'éléphant semble faire grève, il ne répond plus, mais on sent alors une forte vibration monter de l'intérieur de l'animal … Il fait pipi dans l'eau … et recommence à nous arroser de plus belle. Le top du top, en tout cas pour Guillaume, Clémentine et Jean-François, c'est de se faire éjecter dans la rivière, puis de remonter sur l'éléphant en se faisant soulever par sa trompe ! 40 000 muscles dans une trompe ! Ça vous laisse pantois ! La première fois, l'exercice est un peu scabreux ; il ne faut pas lui mettre nos pieds dans les yeux, et se dépêcher d'escalader le crâne avant qu'il ne rebaisse la tête … sinon, on tombe à nouveau à l'eau, et il faut recommencer. La partie de plaisir se termine par des bananes que l'éléphant viendrait presque vous chercher dans la poche, et un petit billet qu'il attrape délicatement avec sa trompe pour le donner à son cornac. Unique et inoubliable ! Nous étions tristes de quitter ces grands animaux balourds et dociles.
Diaporama à regarder avec un parapluie ...
Côté rencontres, nous avons fait la connaissance d'une famille espagnole catalane partie depuis août l'année dernière. Karina et Albert ont fait le tour de l'Asie du sud est avec Abril (4 ans) et Bernat (6 ans). Nous avons passé des soirées très sympa et animées avec eux ! Et nous les avons retrouvés à Kathmandou avant que nos chemins ne se séparent … Ils partent en Amérique du sud pour quelques mois … ou quelques années … Ils ne savent pas encore. Avec la crise économique qui sévit en Europe, ils ne sont pas très sûrs d'avoir envie de rentrer, même si pour eux la Catalogne c'est un peu le paradis sur terre. ...
Nous avons aussi fait la connaissance de Madhav Adhikari, patron de notre hôtel « River View Jungle Camp », et ancien légionnaire ! Madhav a servi 11 ans dans la légion étrangère ! Il est français désormais, et est rentré au Népal il y a 1 an et demi pour reprendre la direction de l'hôtel à la suite de son père. Il veut tout améliorer, changer, rénover …. Il y met toute son énergie, mais ce n'est pas facile pour lui d'accepter les dysfonctionnements de son pays, la lenteur et la corruption. Nous avons passé un peu de temps avec lui à rêver et parler de son projet. Si ça vous intéresse, allez vous installer quelques jours dans son hôtel ! Nous y étions très bien !
Après notre séjour à Sauraha, le 27 mai, nous rentrons à Kathmandou en bus, avec les vélos en soute. Le trajet dure 7h, mais c'est tout de même plus confortable et moins risqué que le précédent. Le lendemain, c'est l'anniversaire de Guillaume, et nous avons encore quelques préparatifs à faire. Les enfants, de leur côté, nous préparent en secret un spectacle … Nous nous sommes installés pour 2 jours à la Dev Guest House à Patan non loin de chez les Wagnon que nous ne voulons pas trop envahir. Nous y avons désormais nos petites habitudes, et le personnel nous connait bien. A vrai dire, depuis 11 mois (presque) que nous sommes partis, nous avons développé notre capacité à prendre possession des lieux et à faire « comme chez nous », où que l'on soit et en l'espace de quelques minutes !
28 mai : grand jour, Guillaume a 14 ans. Nous passons la journée à préparer la soirée, les parents d'un côté, les enfants de l'autre … que de cachoteries ! Le résultat est à la hauteur de l'énergie investie. Le spectacle des enfants nous épate, nous ravit ! Une pièce de théâtre pour commencer : René, Gertrude, leur chien Ritchie Mac Caw et leur fille Anaëlle (18 ans) danseuse contrariée par le désir de son père d'en faire une joueuse de rugby … Entracte avec petites choses à grignoter …. S'ensuit un spectacle d'ombres chinoises sur fond de Yann Tiersen. Les draps de leurs lits ont bien servi. C'était beau, poétique. Jean-François en avait les larmes aux yeux. Changement de musique, et de style avec une présentation de figures acrobatiques, et pour clore le tout, ils nous ont entraînés dans des danses endiablées sur des musiques très actuelles du type « section d'assaut » … Vous connaissez bien sûr ! Tous les détails y étaient : les billets d'entrée, nos numéros de place (sur le lit), le script du spectacle caché dans un coin, les costumes faits avec les moyens du bord. Bref, nous avons passé une excellente soirée ! Sans oublier bien sûr les pizzas et le gâteau d'anniversaire au chocolat, ainsi que les cadeaux.
29 mai : plus que 3 jours. Nous migrons chez Valérie, Patrick et leur 3 garçons, et nous sommes contents de passer à nouveau du temps avec eux. Valérie nous conseille sur les dernières visites à faire, et nous explique le Népal qu'elle connaît très bien. Patrick se lance dans de grandes discussions sur la montagne avec Jean-François. Il est un alpiniste très actif et performant en Himalaya, préférant les ascensions rapides et légères aux grosses expéditions traditionnelles. Un soir, il nous montre un film d'une expédition qu'il a faite en Antarctique avec 2 autres alpinistes et 3 marins dont Isabelle Autissier. Les enfants n'en croyaient pas leur yeux : nous étions admiratifs devant la beauté des images ! Les enfants ont également passé du temps à jouer avec Benoît, Hugues et Luc. Benoît les a emmenés à la piscine, et Guillaume a même fait un peu d'escalade avec eux. Merci encore à toute la famille pour votre accueil, et on espère vous revoir en "expé" dans le Cantal, avec nuit en buron et vélo ou rando.
A Kathmandou, entre 2 emballages de vélos et le tri des sacoches, nous avons pris le temps de visiter encore quelques temples. Si, si, c'est pas fini, on vous en montre encore ! Ils sont tous différents, vous allez voir ! Nous sommes allés au temple d'or du côté de Durbar Square à Patan. Ambiance recueillie et fervente, mélange de bouddhisme et d'hindouisme, offrandes et moulins à prières qui tournent. Nous avons poursuivi avec un autre temple plus grand, et très animé. Ici, tous les jeudis matins, les hindouistes ont rendez-vous avec leurs dieux. Ça sent la bougie au beurre, la fumée un peu écœurante des feux allumés aux 4 coins de l'esplanade pour rendre hommage aux dieux. Chacun apporte ses offrandes faîtes de riz, de fruits, de fleurs, … Chacun trouve une place pour s'entretenir avec un prêtre, prier en famille ou recevoir la marque rouge sur le front. La file d'attente des personnes qui veulent déposer une offrande à Shiva, la déesse de ce temple, est immense. Tout est calme, mesuré, chuchoté, psalmodié.
Diaporama
Samedi 1er juin, c'est le jour du grand départ … Guillaume vous livre ses impressions lui aussi :
« J'ai adoré tout ce qu'on a fait au Népal et j'y serais bien resté un peu plus longtemps. Le trekking, les montagnes, les ambiances dans la rue, les éléphants : tout m'a plu. Les gens sont gentils. Par contre, ce n'est pas le meilleur pays pour pédaler ; il y a surtout des pistes ou des routes pourries. J'ai bien aimé l'expérience d'une journée au monastère, c'était super. Maintenant, il ne reste plus que 2 mois, le temps passe vite et j'attends de découvrir le Cambodge et la Thaïlande. »
Le mari de la Didi nous a trouvé une grande camionnette dans laquelle nous enfournons tout notre bardas, et nous rejoignons l'aéroport sans encombre. Embarquement rapide et efficace avec Malaysian Airlines. Nous quittons le Népal avec émotion. Ce pays est beau et attachant. Nous souhaitons aux népalais de trouver suffisamment de stabilité politique pour améliorer les infrastructures nécessaires à une vie un peu plus facile.
Après 17h d'escale à l'aéroport de Kuala Lumpur, et une nuit par terre ou sur des fauteuils très raides, nous atterrissons à Siem Reap au Cambodge dans l'après-midi du 2 juin. Il nous faut ensuite 2 petites heures pour remonter les vélos à l'aéroport, puis nous rejoignons Siem Reap (à 10 km), et trouvons un hôtel confortable. Avec Jean-François, nous étions passés là il y a 15 ans ... On se souvenait d'un gros bourg avec des rues en terre et des petites guest house ... Il y a des dizaines d'hôtels de luxe, une belle route large et bien goudronnée, des magasins pour touristes partout ... La ville a explosé !
Aujourd'hui, grasse mat' dans nos grands lits très confortables et nos chambres climatisées .... Bon petit déj copieux, puis journée tranquille : coiffeur pour Alice, lessive (c'est à dire qu'on a donné 6 kg de linge à laver ), balade, télé, et lecture au Centre Culturel Français. Demain, nous commençons la visite des temples d'Angkor. Nous y allons à vélo, et nous prévoyons 3 jours de visite.
Premiers changements et découvertes : ici on paye surtout en dollars ... La monnaie locale (riel) est utilisée pour les petites choses pas chères comme des fruits, ou un en-cas à base de riz à 1000 riels (0,22€). Le coiffeur ici, c'est 12000 riels (à peine 3€)... Il existe même des billets de 100 riels ...
Autre bonne surprise : c'est (pour le moment) beaucoup moins sale qu'à Kathmandou. Il y a bien quelques déchets par-ci par-là, mais très peu ! Il y a de l'électricité 24h/24 ! TV5 Monde à la télé , Des "petits écoliers" au chocolat noir et du shampoing "le petit marseillais", des jus de fruits mixés, ... et pour manger on n'attend à peine 5mn pour avoir notre plat de riz ou de pâtes. Un record après les 30 à 60 mn, voire plus au Népal .... C'était long !
Autre changement, (pourvu que ça dure), nous n'avons presque pas vu de chiens ... ni de moustiques ... auraient-ils éradiqué les bestioles les plus pénibles de la planète ?
Voilà pour les premières impressions. Nous vous raconterons la suite dans quelques jours.
N'oubliez pas Sarah … Nous pensons toujours fort à elle.